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Les Musées du Patrimoine Traditionnel: Etat des lieux et perspectives

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Bien que l'intérêt porté à la collecte et à l'exposition d’objets ethnographiques en Tunisie remonte à la période coloniale, l'engagement de l’Etat pour cet aspect du patrimoine culturel n’a officiellement débuté qu’à l'indépendance.
En 1939 « Dar Jellouli » à Sfax fut le premier espace aménagé en un « musée » par le chercheur Lucien Gulfin. Il est à remarquer que l'administration coloniale n'avait officiellement créé aucun musée ethnographique durant l’occupation du pays et portait une vision colonialiste à ce patrimoine culturel vivant qu’elle qualifiait d’« art indigène ». En 1967 a été créé le Musée des arts et traditions populaires Dar Ben Abdallah, suivi d’un ensemble d’autres musées consacrés à la collecte et à l’exposition de collections ethnographiques relatives à la culture populaire du pays. Actuellement, la Tunisie compte 11 musées consacrés aux traditions populaires et répartis sur différentes régions. Cependant et en dépit des efforts déployés dans le secteur, il reste beaucoup à faire surtout que l'État-nation n'a pas été en mesure d'établir des « musées narratifs » dans ce domaine. Par ailleurs, une répartition géographique déséquilibrée entre les régions ; l’absence d'un cadre juridique qui contrôle l’organisation des musées, leurs prérogatives et leurs objectifs ; l’inadéquation des espaces consacrés aux musées et dont la majorité sont des monuments historiques réaménagés pour accueillir des expositions permanentes ; constituent autant de facteurs préjudiciables à notre patrimoine très riche et nécessitant sa mise en valeur.
A l'heure où les musées du "patrimoine traditionnel" dans le monde se sont développés, profitant des connaissances et des progrès technologiques, de la naissance de concepts et d’applications qui travaillent à se débarrasser des méthodes classiques d’exposition du patrimoine sous une forme figée et à le présenter comme un patrimoine culturel vivant et dynamique, nos musées n’ont pas suivi ce progrès. En effet, d’une part, leurs collections n’ont pas bénéficié de l’intérêt qui leur est dû et sont aujourd’hui détériorées, d’autre part leurs rôles d’espaces consacrés à l'éducation et au divertissement n’ont pas été remplis. Par conséquent, les musées tunisiens n'ont pas réussi à améliorer leur lien avec leur environnement social et avec les visiteurs. Au vu de l’état actuel des musées, il est nécessaire d’avoir une vision globale de la situation et un diagnostic scientifique approfondi permettant de définir le rôle et les objectifs du musée conformément à la stratégie de notre pays dans ce domaine, au système juridique relatif à la réglementation de sauvegarde et de conservation des collections, à la sécurité des visiteurs, ainsi qu’à la promotion des musées.
Sur la base de ce qui précède, nous proposons les thèmes suivants :
Origines et développement des musées du « patrimoine traditionnel » :
Les organisations muséales et culturelles internationales ainsi que les lois des pays, fournissent de multiples définitions des musées. Ce que l'on constate, c'est que ces définitions ont constamment changé afin de suivre l’évolution de l'histoire, du développement technologique et cognitif et du changement social qui l'accompagne. Ce problème a fait l'objet de nombreuses études qui ont tenté de définir le musée selon les exigences du XXIe siècle. Certains pays ont également pris l'initiative de mettre en place des comités scientifiques pour étudier les besoins du musée au cours du siècle actuel, comme la France, où en 2017, le ministère français de la Culture a reçu un rapport du groupe de travail portant sur la mission des « musées du XXIe siècle ». La classification des musées a fait l'objet de controverses parmi les spécialistes de ce domaine qui se sont basés soit sur la typologie par statut juridique, ou sur la typologie par zone géographique et par taille ou sur l'approche par la forme ou sur l'approche thématique. Cette dernière classification reste la plus répandue parmi les spécialistes.
Le présent colloque propose dans cette section de suivre les évolutions des « musées du patrimoine traditionnel » afin d'établir une nouvelle définition en phase avec les dernières notions liées à ce type de patrimoine, tout en soulignant l'importance de l’aspect juridique en tant que cadre dans lequel les concepts sont organisés et les relations et les rôles sont contrôlés.
Les musées du patrimoine traditionnel face aux transformations culturelles, sociales et technologiques :
La condition de survie du musée est d’accompagner les transformations culturelles et sociales que connaissent les sociétés et de bénéficier des nouvelles technologies. Chaque manquement à cet accompagnement limite la capacité du musée à remplir convenablement son rôle. Ceci tout en soulignant le rôle crucial des nouvelles technologies dans la communication du message du musée à un large public ainsi que dans la création d'espaces pour l'interaction de ce public avec son musée. Ainsi, ce dernier se transforme en un espace favorisant l'interaction et le pluralisme culturel et non plus un refuge de collections figées placées dans des vitrines en verre.
La réalité des musées du patrimoine traditionnel face au développement des sciences muséales et des concepts relatifs au patrimoine :
Depuis l'instauration du folklore en tant que discipline au début du XIXe siècle jusqu'à la notion de patrimoine culturel immatériel, en passant par l'ethnologie, les « arts et traditions populaires » ont été un sujet muséal intéressant pour de nombreuses disciplines, telles que leur étude, leur sauvegarde, leur conservation, leur restauration, leur exposition et autres. Compte tenu du développement des sciences muséales et de l'intérêt grandissant que suscite le concept de patrimoine culturel immatériel, il est important que les musées relatifs à ce patrimoine accompagnent ce développement.
Comment faire du musée du patrimoine traditionnel une destination pour les visiteurs à la lumière d'expériences comparatives ?
Il ne fait aucun doute que le système muséal en Tunisie souffre de divers dilemmes, principalement causés par l'absence d'une stratégie nationale dans ce domaine, qui fait apparaître les tentatives d'intervention et de réforme comme un acte patchwork dont les limites apparaissent rapidement. Sans perdre de vue les défaillances de la plupart des musées, certains d'entre eux, qui ont bénéficié d'interventions importantes, n'ont pas non plus réussi à combler le fossé avec le public, ce qui remet en cause l’essence de leur existence. Pour ne pas tomber dans le nihilisme, nous devons travailler à répondre à la question suivante : comment faire de nos musées une destination pour le visiteur local tout autant que pour le visiteur étranger ? Dans ce contexte, il convient de noter que la finalité de la promotion du musée en tant qu’entité culturelle n'est pas un but lucratif mais celui de réaliser un rayonnement sur son environnement social immédiat d'une part, et d'augmenter le nombre de ses visiteurs et de renforcer sa relation avec eux d'autre part. Ainsi, le musée aura réussi sa mission éducative et culturelle et aura ancré les valeurs humaines universelles dans la société.

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